Les plus anciens, - c’est un euphémisme – se souviennent forcément de la couverture du Lagarde et Michard qui les accompagnaient dans les cours de littérature des 3 années du Lycée. « L’inspiration du Poète » signée de Nicolas Poussin donnait à voir une des œuvres du maître de l’école classique française sur laquelle les personnages apparaissaient dignement vêtus. Mais l’œuvre de cet artiste étonnant va bien plus loin.
Pour s’en convaincre et s’en régaler, il suffit de se rendre au Musée des Beaux-Arts de Lyon jusqu’au 5 mars et découvrir ainsi avec l’exposition Poussin et l’Amour que Poussin le sage, le sérieux, l’académique, l’austère s’est adonné à de multiples reprises au pur plaisir de peindre.
Tout y est. Du plus rare au plus troublant. Du plus inédit au plus fragile.
Avec cette exposition, on entre dans l’imaginaire érotique d’un maître qui n’a pas fait que frôler l’interdit et qui a décliné sans retenue les modalités de la domination de l’Amour sur les hommes comme sur les Dieux à travers les mythes de l’antiquité gréco-romaine. Qui l’eût cru…
En dévoilant ces œuvres, le musée des Beaux-Arts de Lyon est, en ce début d'année « the place to be ». On suit alors le travail enthousiaste des commissaires de l’exposition Nicolas Milovanovic et Mickaël Szanto, (on les entend sur les guides audios de l’exposition, profitez-en !) tous deux « prêtés » par le musée du Louvre et qui décrivent et présentent Poussin avec une espèce d’espièglerie d’adolescents très rafraichissante.
Ils ont ainsi rassemblés des œuvres inédites qui sont présentées en Europe pour la première fois.
Certaines ont été restaurées à l’occasion, au point que le vernis est à peine sec et d’autres, trop fragiles, ne voyageront plus jamais comme « Tempête avec Pyrame et Thisbé » prêtée par le musée de Francfort.
Vénus et Adonis ont la part belle dans ces tableaux puisqu’il est question d’amour résolument charnel. Au point que le musée n’a pas osé utiliser la toile « Vénus épiée par deux satires » pour l’affiche de l’exposition.
Sérieusement agrandie pour les besoins de la cause, la belle Vénus nue et alanguie avec sa main entre les cuisses et les satyres au regard lubrique cachés, sexe en main, derrière les arbres auraient fait rougir beaucoup de monde et dérangé certains passants. Même à notre époque pas bégueule.
Poussin trouvait son bonheur dans ces représentations, lui qui disait que « c’est quand on est amoureux que l’on crée des chefs d’œuvre » et se pliait à l’idée incontournable que la domination de l’Amour agit sur les hommes comme sur les Dieux.
Le maître est chez lui à Lyon. Il y a vécu de 1619 à 1622 et le musée a fait l’acquisition de « La mort de Chioné » en 2016 après La Fuite en Egypte en 007. Là aussi, c’est une histoire d’amour. Mais pas du même genre…
Quand je vous le dis!
L’exposition comporte deux volets et se prolonge avec « Picasso/ Poussin/ Bacchanales » qui utilise « Le Triomphe de Pan » réalisé en 1944 et inspiré du même intitulé par Nicolas Poussin en 1636 pour illustrer son influence sur l’artiste.
De nombreuses activités sont organisées autour de l’exposition : Théâtre, musique, danses de la Renaissance…
Qui n’a rien à voir. On connaît l’attachement réciproque entre l’immense Pierre Soulages, récemment décédé le 26 octobre 2022 et que l’on a vu promener sa longue silhouette flanquée de son épouse aussi menue qu’il était grand dans les allées du musée lyonnais qui a fait l’acquisition de certaines de ses œuvres. Dont une, dont je l’ai entendu dire en personne qu’elle était sa préférée. Un hommage lui sera rendu le week-end des 11 et 12 mars