Il y a formellement un double intérêt à l'organisation des Journées Européennes des Métiers d'Art qui se tiennent les 30-31 mars et 1er avril dans toute la France, mais aussi en Espagne, en Suisse, en Italie et dans la province de Liège en Belgique.
D'abord celui de découvrir les 217 métiers d'art répertoriés et qui répondent à l'exigence de 3 critères "Transformation de la matière, production d'objets uniques ou de petite série présentant un caractère artistique et maîtrise des savoir-faire " pendant trois jours riches en événements de toute nature.
Et aussi celui, pourquoi pas, de décider enfin de changer de vie et de se consacrer à une passion enfouie au fond de soi, si l'on a un tempérament artistique refoulé par une formation obligée à un métier dit "sérieux".
Ce genre de personnes Véronique Furlan qui dirige la SEPR (Société d'Enseignement Professionnel du Rhône ) à Lyon, en parle joliment. Dans son établissement, elle forme des élèves qui ont choisi de ne pas passer un bac scientifique, peut-être pas forcément à leur portée d'ailleurs (et il n'y a aucun mal à ça) avant de s'enfoncer dans une prépa et plus si affinités. Voire à qui l'on a proposé autre chose et qui vont peut-être, par défaut, se découvrir une vraie vocation. De celles qui épanouissent et donnent des couleurs à la vie.
Mais les adultes en reconversion sont nombreux aussi à pousser la porte. Ils ne sont pas forcément en échec et précipités dans une autre voie par le chômage. Loin de là. Ils poussent la porte de la SEPR à tous les âges. Après l'Université ou une carrière déjà bien avancée dans la vie active. Ils ont connu les "joies" des bureaux de la Défense ou équivalent. Ont eu leur dose de RER et de réunions tardives qui leur sont désormais devenues insupportables malgré les ressources des RTT.
Et on assiste, précise Véronique Furlan, "à des reconversions époustouflantes. A de vraies libérations du moi profond ". Le rôle de l'organisme formateur, c'est de faire en sorte que cette "envie qui vient de loin et à laquelle on donne la parole, soit viable ". Pour cela, il s'agit de les accompagner y compris au niveau technique et administratif. Pour cela, il faut savoir qu'il existe 102 centres de formation sur tout le territoire.
Peut-être Isabelle Rochéen est-elle passée par là... Ingénieur de formation, elle a repris à Paris la Maison du Pastel, entreprise familiale qui fabrique depuis 3 siècles des pastels à la main et propose plus de 650 nuances à une clientèle qui a compté Degas, Safran et Redon dans ses rangs. C'est fou ce que les ingénieurs finissent par abandonner la carrière. On pense à Aurélie d’Assignies-Chauvin qui a monté son atelier de cuisine "Délicieusement Vôtre" à Sainte Foy les Lyon ou encore à Christine Grosjean, ingénieur INSA, amoureuse du chocolat et épanouies elles aussi désormais, qui a ouvert à Charly au sud de Lyon son atelier "Il était une fois Chocolat" dans lequel on apprend à travailler le chocolat.
L'objectif des JEMA, comme on les appelle en raccourci, est d'atteindre le même degré de notoriété que les Journées Européennes du Patrimoine qui se déroulent chaque année en septembre et c'est tout à fait à leur portée.
Dans un pays dont on regrette la désindustrialisation, les métiers industrieux et individuels comme les métiers d'art sont une ressource infinie et non délocalisable. Du moins si l'on est attiré par la qualité de l'inspiration et du savoir-faire. Comment créer et fabriquer ailleurs des objets de luxe qui font la renommée internationale d'entreprises haut de gamme comme Hermès, Vuitton, Bernardaud, Lalique, Baccarat, Chanel qui, toutes, possèdent des ateliers métiers d'Art?
C'est aussi le cas, dans un genre plus individuel et avec l'audace qui caractérise ce genre d'entreprise, de Stéphanie et Julien Pitrat qui voient défiler le monde entier dans leur atelier d'objets décoratifs à base de vitrail du quartier Renaissance du Vieux Lyon, classé au Patrimoine de l'Unesco. Ceux-ci font partie de l'association des Artisans d'Art à Lyon qui compte dans ses rangs des bronziers, doreurs sur bois, horlogers, marbriers, relieurs et autres talents... Parmi leurs meilleurs clients, les Australiens qui commandent de belles pièces et se font livrer à l'autre bout du monde.
On en profitera si l'on est pendant ces 3 jours entre Rhône et Saône pour visiter l'exposition "Quand les Livres s'amusent " qui se tient du 30 mars au 24 juin au musée de l'Imprimerie et présente ce que l'on appelle des livres à systèmes. Une spécialité qui a vu le jour en 1230, a connu son épanouissement au 14ème siècle et continue de nos jours avec les "pop up ". Le musée a bénéficié de nombreux prêts. Notamment de la Bibliothèque Nationale, de la Bibliothèque Municipale de Lyon et surtout de Robert J Roben, le plus grand collectionneur américain dans le genre.
A Paris les manifestations sont évidemment fort nombreuses. On citera, entre autres merveilles, l'atelier de restauration d'œuvres modernes et contemporaines d'Alex Vanopbroeke qui voit passer entre ses mains des œuvres de Picasso, Soulages, Pincemin et à qui l'on doit la restauration du café Lapérouse.
Et aussi dans les Plus Beaux Villages de France, œuvres d'art en eux-mêmes, à la découverte de l'art de la faïence et de la Coutellerie à Moustiers, pour faire une balade en Côte d'Or à Flavigny-sur-Ozerain et rencontrer les artisans d'art de la Maison des Arts Textiles & du Design, mais aussi de Saulieu, Semur en Auxois et Dijon. En profiter, le cas échéant pour faire un détour à Vézelay où le cuisinier de l'Espérance, Marc Meneau artisan d'art dans son genre, vient de se voir décerner le Talent d'Or des Talents du luxe et de la Création 2012.
Visiter enfin, dans l'Indre Gargilesse-Dampierre, le village de George Sand et les ateliers des artisans qui s'y sont établis. Nul besoin de couvrir des kilomètres pour découvrir le travail passionnant de tous ces gens qui aiment ce qu'ils font et ont, pour certains, repris leur destin en mains. Il y a 289 manifestations, 34 circuits dans 3295 ateliers. Le week-end n'y suffira évidemment pas.
lundi 26 mars 2012
MÉTIERS D'ART ET D'AVENIR
Publié par Martine Montémont à 14:32 1 commentaires
lundi 12 mars 2012
SUR LES HAUTEURS DU LAC MAJEUR
Mon propos n'est en aucune façon de vous emmener visiter les villas Belle Epoque qui jouissent de la plus belle vue sur le lac, ses montagnes et, au delà, sur la plaine du Po et Milan la fashionita. Ce sera l'objet d'un autre sujet.
Le lac Majeur a évidemment un arrière pays. Il s'agit des Alpes, escarpées à souhait. Bien plus sauvages que l'on ne pourrait s'y attendre, presque loin de la civilisation montagnarde telle qu'on la conçoit aujourd'hui avec remontées mécaniques et jolis chalets de bois.
Bien à l'abri de la chaîne versant français qui regarde vers l'Ouest, cette partie là est celle des Alpes grondeuses d'eau et de ressauts, rebelles, chahuteuses et chahutées. Un régal pour les amateurs de vraie nature qui ne se laisse pas faire.
Terrain de jeu pour les trekkeurs, ils attirent à la belle saison (l'hiver y a été rude, ce qui est bon signe...), les amateurs de balades interminables, voire de véritables "bavantes" avec, en perspective, le versant italien du Mont Rose, les séjours dans les "agritourista", la dégustation de produits locaux et des guides qui sont là pour vous faire cracher les molaires!
C'est mon bémol à moi. Ne vous laissez pas faire et annoncez tout de suite la couleur. L'envie de respirer l'air frais et de profiter de paysages grandioses, n'implique pas forcément de crapahuter par tous les temps et à un rythme soutenu (pour ne pas dire mieux). Car tous ceux qui veulent éveiller au tourisme ces contrées à peine explorées doivent se dire que, s'ils ne réservent les atouts de leur montagne qu'aux grands sportifs qui ont déjà "fait" l'Himalaya, ça ne va pas faire beaucoup de monde! Annoncez la couleur et allez-y en douceur soutenue, mais allez-y. Il y a quantité de trésors à découvrir...
En cette fin du mois de mars, les balades en ski de randonnée ou en raquettes dans l'Alpe Devero ont encore bien des chances d'être envisageables. Peut-être même, (mais, c'est loin d'être sûr en cette saison), l'éventualité de marcher sur la surface gelée du lac de Devero. Ce qui a certainement été possible pendant les froids sibériens de février sans aucune difficulté.
Le dépaysement est total depuis les rives très (trop?) civilisées du Lac Majeur quand on rejoint Devero à la nuit tombée. Avant d'y parvenir, une balade à travers les Gorges d'Uriezzo, ses marmites de Géants et la cascade du Toce qui dégringole de 143m et a gagné ainsi la dénomination de "plus beau saut des Alpes " est incontournable et même recommandée. Avec une rencontre étonnante, celle de la «Tombe d’Uriezzo ». Ces rochers, les plus profonds des Alpes, sont appelés «Elément zéro ». Parce que, précise le géologue, tout autant fasciné que les touristes, il s'agit là du socle le plus proche, à notre échelle, du centre de la terre.
Ne reste plus qu'a rejoindre l'église de San Gaudenzio à Baceno, un monument du 12ème siècle qui entraîne à la rencontre des artistes italiens et du charme saisissant de leurs œuvres. Mais si la route jusqu'à Devero se fait en voiture, impossible d'atteindre la Casa Fontana, une sorte d'hôtel, chambres d'hôtes tenu par des Genevois, littéralement aspirés par cette belle nature exigeante et qui viennent chercher leurs hôtes en 4x4 pour grimper jusqu'à leur maison. Arrivés là, on leur prête des chaussons, car il est interdit de ruiner les parquets avec les chaussures de randonnée. C'est un lieu qui donne le ton du séjour. On y déguste tout ce qui va faire le charme de l'expédition. Les merveilleuses charcuteries italiennes, risotto (aux myrtilles), polenta... accompagnés de vins rouges et blancs tout à fait délicieux et dont on n'imagine même pas l'existence car ils sont, pour la plupart inconnus de nos cavistes hexagonaux.
Pour déguster le fameux fromage Betellmatt du Devero, autant se rendre au cœur du sujet. A la rencontre, après avoir parcouru les alpages du Parc Naturel Veglia Devero de la production dans les caves de l'agritourisme Alpe Crampiolo. Les "agritourista", fermes auberges à l'italienne ponctuent le voyage de tous ceux qui choisissent de visiter la région en mode doux, c'est à dire à pied, bien équipés de chaussures de randonnée aussi légères et costauds que possible. Pour explorer les tourbières du "Grande Est " de Devero et s'approcher au plus près de l'histoire des Alpes. Loin, très loin d'une civilisation française, ou italienne aussi, qui a construit des stations de sports d'hiver à peu près partout. Les sensations sont très différentes et méritent vraiment le détour.
Comme les hommes sont installés dans ces montagnes depuis que le monde est monde, la spiritualité y est évidemment prédominante. Nombreux calvaires, petites églises aux peintures majestueuses et les "Monts Sacrés " du Piémont inscrits depuis 2003 au Patrimoine de l'Unesco. Comme le Sacro Monte Calvario proche de Domodossola et son jardin aux essences alpestres et méditerranéennes.
Le petit train de la Vigezzina au départ de la ville, qui est le cœur des Alpes du Lac Majeur, - sachant tout de même qu'il s'agit d'un immense territoire hexagonal entre Turin, Gènes, Milan et Zürich, Berne et Genève - conduit vers Santa Maria Maggiore. Il s'agit d'une petite cité de passage pour les voyageurs où le commerce était prospère et l'étape à l'hôtel Miramonti, délicieuse maison familiale où l'on parle français avec aisance est un vrai moment de détente et de bonheur qui donne l'occasion de déguster à l'apéritif de toutes simples crêpes à la farine et au sel que les dames de la maison, en costume local servent aux clients.
La visite du Musée du Ramoneur s'impose. Il raconte l'histoire de ces petits montagnards qui quittaient leur famille en hiver quand ils n'étaient plus que bouches à nourrir et qui se glissaient dans les cheminées grâce à leur petite taille. Les plus charitables des patrons, pris de scrupules à l'idée de martyriser ainsi des enfants, avaient imaginé d'utiliser des oies qui nettoyaient les conduits en battant des ailes!
Pour découvrir la vie d'autrefois dans ces montagnes où les villages aux toits couverts de pierres plates sont encore nombreux, les musées ruraux installés dans d'anciens moulins émaillent la région et le dépaysement est total quand on retrouve les rives du lac, le spectacle des îles Borromées, le charme des petites rues de Verbiana, de Cannobio et de Cannero dont il ne faut bien sûr pas manquer les marchés. Pas pour y faire emplette de contrefaçons (nombreuses, on vous interpelle avec des "Dolce Gabbana ", "Versace ", "Fendi " et autres "Prada " à des prix déjà élevés pour du faux!), mais pour y repérer de la maroquinerie locale très jolie et aussi les produits de la gastronomie fort savoureux.
A ne pas manquer:
- Les derniers feux de l'exposition Le Caravage à Domodossola jusqu'au 18 mars. Et les expositions du "Sentiero dell'Arte" du 6 au 9 avril sur le thème de "L'Esprit du Vent " avec plus de 60 artistes dans 16 endroits différents entre Tragero et Chaglio sur le lac Majeur.
- Entre le 31 mars et le 2 juin, l'association Piccoli Alberghi Tipici e Ospitalità di Montagna, organise des rendez-vous gastronomiques les "Serate di Gola" dans 8 établissements des bords du lac et de la montagne pour permettre aux gourmands de découvrir les produits régionaux et la façon de les accommoder des auberges locales.
Publié par Martine Montémont à 09:52 1 commentaires
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