C'est le moment cette semaine, de balayer devant la porte d'un certain nombre de lieux communs. L'idée que l'on se fait de l'Ardèche Méridionale tout d'abord. C'est le Midi, mais pas tout à fait... Vrai! Le soleil est présent et le Mistral aussi le bougre (ah cette dégustation de Côtes-du-Vivarais AOC dans le jardin du musée de la Lavande de Saint Remèze sous les bourrasques!). Mais il s'agit aussi d'une terre sauvage, cévenole, entre volcans assoupis et Méditerranée, traversée, à fond la caisse, par une rivière d'Ardèche tumultueuse qui creuse ses célèbres gorges et coupe le souffle de ceux qui regardent et de ceux qui la descendent en canoë.
Les hommes préhistoriques déjà, savaient que les lieux valaient qu'on y aménage ses grottes. Ils ont vécu, il y a longtemps dans des lieux comme la grotte Chauvet. Décorée d'animaux sauvages et de représentations artistiques de la vie quotidienne, elle "enfonce" le célèbre site de Lascaux. D'autant que les peintures n'ont pas été couvertes des moisissures provoquées par la respiration de milliers de visiteurs. Elle est donc intacte et entièrement livrée aux scientifiques et autres experts. D'ici 2 ans environ, il y aura une réplique ouverte aux visiteurs. Exactement comme à Lascaux.
En suivant la départementale qui longe les gorges, on aperçoit, de loin, l'entrée de la grotte. On imagine difficilement qu'il ne puisse exister que celle-ci. Excitant! Les hommes sont en Ardèche du sud depuis... Mettons toujours! On retrouve les Romains à Alba-la Romaine la bien nommée dont le festival se tient du 14 au 18 juillet 2010. Pas d'opéra grandiose sur le site, mais une vision bien différente du spectacle. Ce sont les clowns et leur nez rouge qui ont investi depuis quelques années le site gallo-romain. Alba-la-Romaine est un des villages de caractère d'Ardèche. On citera aussi le premier d'entre eux Antraigues, cher à Jean Ferrat et où il est désormais enterré. Balazuc et son château. Et d'autres encore où nous irons faire un tour un de ces jours.
Du temps des Romains, la vigne et le vin existaient déjà. Et là encore, autre lieu commun: Les quelques 23 "coopets" que comptent les vins d'Ardèche ne produiraient que du "picrate" en cubitainers. Faux, archi faux! Ils sont bons et même très bons. Pas une fausse note parmi les blancs issus d'une dizaine de cépages dont les Chardonnay, Grenache, Roussanne et Vioginier, les rouges de Grenache, Syrah et surtout Gamay et les rosés dont pas un seul ne dépasse les 10EUR au départ de la cave.
D'où l'intérêt d'aller les déguster et les acheter sur place. De préférence quand les Hollandais seront repartis chez eux (trop de monde en plein été, bien que je n'aie rien contre les Bataves!). On en profite pour aller admirer le fameux Pont d'Arc et découvrir qu'il s'agit vraiment d'une région divinement sauvage.
Au détour d'une route de montagne qui conduit vers l'hôtel restaurant la Mère Biquette, depuis lequel, on va surplomber une vallée de merveilles, on croise des chèvres sauvages archi-baraquées. Les "chèvres à Bouboule" (du nom de leur proprio, un sympatoche exilé des villes) sont costauds. Rien à voir avec nos biquettes ordinaires.
La rencontre est tout à fait possible aussi avec des cochons sauvages. Un croisement du porc domestique et des sangliers des forêts ardéchoises. Ceux-là même qui ont tendance à dévaster un peu les vignes qui s'alignent comme des rangs de tricot et alternent avec les champs de lavande. Ils sont rigolos et tiennent vraiment, physiquement, du père et de la mère.
Les vignerons ardéchois ressemblent à leur terre (logique). Il en est un qui raconte comment il a pris la tête de quelques uns de ces agriculteurs opiniâtres qui ont replanté du chatus, un cépage oublié, bien rouge ou plutôt bien noir. Caractérisé par ses grosses grappes à petits grains. Il donne un rouge de fort tempérament qui, aux dires du vigneron, "ne vous saute pas au cou". Evidemment, il s'agit d'un vin de garde, une exquise curiosité qui donne bien du mal à ceux qui le plantent et l'élèvent.
Les vignerons-maçons, comme on les appelle ici, passent encore plus de temps à relever les "faïsses" (les murets) qu'à cultiver la vigne. Et ils ont du mérite. Le m2 de terrain agricole coûte environ 1EUR et pourrait se revendre 100EUR à de riches étrangers qui bâtissent de superbes mas de pierres sèches occupés tout juste un mois par an. Mais c'est ainsi aussi qu'ils entretiennent la campagne et prennent soin des paysages en relevant les ruines.
Les AOC Côtes du Rhône sont bien défendus par les viticulteurs et se font parfois remarquer grâce à des vignerons (-nes) comme Hélène Thibon du Mas de Libian à Saint-Marcel-d'Ardèche, qui sait parler des vins en usant d'anthropomorphismes. Elle les appelle ses "bébés", dit qu'ils sont encore "dans les couches" ou que ce sont des "ados" et manifeste toute sa fierté d'être la 7ème génération depuis 1670. Sinon, qu'il n'y a plus désormais que des filles dans la famille. Mais quelles filles!
Ou encore Raphaël Pommier producteur de Côtes-du-Vivarais au Domaine Notre-Dame-de-Cousignac à Bourg Saint-Andéol, père de 4 filles (encore!) et ardent défenseur des produits ardéchois par le biais de l'association Goûtez l'Ardèche. Il parle lui, des rosés, qui ne sont pas que des vins pour l'apéro, mais des vins de repas. A boire sur les tomates farcies et tout ce qui est à base de légumes du soleil confits dans la cuisine. A table!
L'Ardèche a des ressources. Gastronomiques, touristiques et de vraiment excellents vins. Elle vaut le détour et même le séjour. D'autant que, bien des vignerons, comme un peu partout, accueillent les touristes dans leurs chambres d'hôtes et gîtes. Heureuse compensation d'une hôtellerie parfois essoufflée et frileuse qui ferait bien parfois - c'est un conseil - de se remettre un peu en question.
jeudi 10 juin 2010
LES VINS DES GORGES
Publié par Martine Montémont à 16:29
Libellés : Attraction, Gastronomie, Hébergement, Vacances, Week-end
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