Pour fêter le bicentenaire de cette maison de vins d'Anjou, spécialisée dans les bulles fines et légères, il fallait frapper fort. En prenant pour modèle la pugnacité du fondateur Jean-Baptiste Ackerman qui a fait souche dans les tuffeaux du Val de Loire après avoir quitté sa Belgique natale.
Sa maison de vins qui est aujourd'hui la 1ère Maison de Fines Bulles de Loire, il l'a pour ainsi dire fondée en 1811 à l'âge de 21 ans en s'installant à Saumur et en débutant l'expérimentation de la méthode champenoise.
Il obtiendra une médaille d'or en 1838. On dirait aujourd'hui que c'était un gamin, de ceux dont la valeur n'attend pas le nombre des années, un Steve Jobs, un Bill Gates ou un Mark Zuckerberg du temps de la Révolution.
Il a commencé par le négoce et finit par épouser Emilie Laurance, la fille de son patron qui avait 15 ans de moins que lui, mais ce n'était pas un arriviste. Monsieur Laurance et sa fille n'ont eu qu'à se louer de l'énergie et de l'esprit d'entreprise de Jean-Baptiste. Tout le monde y a trouvé son compte.
Les caves Ackerman ne datent pas d'hier. Dans leur état actuel s'entend. Elles ont même été les premières caves oenotouristiques avant que le concept lui-même n'existe. Partant de là, il fallait faire fort et installer une vraie scénographie dans ce qui était autrefois le lieu de travail de quelques 300 personnes présentes 10 heures par jour qui ne devaient pas trouver si agréable que cela de travailler dans une température constante de 12° toute l'année et une hygrométrie de 85 à 90%. Mais pour le vin, c'était idéal.
Il était facile de baptiser le parcours "Voyage au Centre de la Bulle", mais il fallait le faire. Comme partout en France, l'Anjou a ses gloires locales. Ici, c'est Jules Verne, natif de Nantes.
Entrée dans un monde doré, univers "Royal " qui raconte l'histoire de la maison par la voix raffinée d'une comédienne qui joue Emilie Laurance, puis fuschia "EXcentrique " et vert "Crémantissime ". Pour conclure par les "explositions 1 ", "2", "3, "4, "et 5 ", créées par le plasticien performeur Yorga qui a trouvé pour s'exprimer un vaste espace de 20 mètres de hauteur sous plafond.
Evidemment, on est piloté sur la partie visitable des caves avant de déboucher sur la boutique qui vend les vins en question et notamment la Cuvée du Bicentenaire, élégant d'assemblage des 7 cépages du Val de Loire. Le Chenin aux arômes d'agrumes, le Cabernet franc pour l'équilibre, le Chardonnay pour la matière, le Cabernet Sauvignon pour la complexité, le Grolleau gris pour la finesse, le Pineau d'Aunis et ses notes épicées et l'intensité du Sauvignon. On y trouve aussi l'ouvrage retraçant l'histoire de la maison et signé de Geoffrey Ratouis, docteur en histoire et professeur à l'Université d'Angers.
Mais il est passionnant d'apprendre au cours de la visite que si le Crémant est de Loire et le Champagne bien de chez lui, c'est à la suite d'une belle bagarre juridique qui a duré plus de 20 ans.
L'appellation "Champagne " n'étant pas déposée, les viticulteurs d'Anjou et ceux de Champagne se partageaient aimablement le marché. Les seconds n'hésitant pas à acheter des raisins aux premiers, en raison du fait que les cépages étaient à peu près les mêmes et qu'ils étaient excellents pour la prise de mousse. Les Angevins vendaient leur "champagne " moins cher aux Britanniques, en Inde et au Canada et les Champenois comme Bollinger et Roederer se réservaient la Russie.
En 1870, ces derniers réagissent et traînent les Angevins en justice. La Cour d'Appel de Paris au bout de 2 dizaines d'années va les obliger à délimiter leur appellation. Il en résultera deux syndicats, un Champenois et un Saumurois. Les premiers auront le droit de s'appeler "Champagne ", les seconds garderont "Mousseux ". Aïe. Bollinger, d'ailleurs, les remerciera officiellement.
Depuis, après avoir creusé un peu le sujet en plus des caves de tuffeau, on préfère "Fines Bulles " dans la région de Saumur. Plus dignement connoté et loin du breuvage bon marché, élaboré à peu près partout qui fait mal à la tête et dans lequel on trempait autrefois un boudoir au dessert!
Tout cela pour dire que la région a du punch et des atouts. La région de Saumur elle-même est riche en ressources variées. Pendant tout l'été, le Château de Saumur avec "Le Trésor des Ducs d'Anjou" un spectacle sons et lumières qui mobilise 150 comédiens, replonge les visiteurs à l'époque du Roi René, au temps des duchesses, des courtisanes d'Anjou et de la mémoire des cachots.
Au château de Montsoreau, on joue à se perdre dans un labyrinthe historique et on peut aussi assister à la scénographie "Les Imaginaires de Loire " qui évoque le personnage de la Dame de Montsoreau, héroïne d'Alexandre Dumas.
On suit les chemins balisés pour remonter à vélo (c'est assez plat) les 800km qui longent la Loire et on se branche sur les 19 plus grands châteaux de la Loire pour un périple interminable et passionnant qui peut parfaitement durer tout l'été si on a le temps de s'y consacrer ou d'y revenir.
mercredi 1 juin 2011
CŒUR DE BULLE
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