jeudi 22 avril 2010

LA CREUSE DES BATISSEURS



Maçon, Martin Nadaud l'était jusqu'au fond de l'âme. C'est un métier que le «député à la blouse» a exercé pendant 20 ans avant de connaître les ors des palais de la République et les bancs de l'Assemblée Nationale au milieu de ce XIXème siècle où tout était à faire, à inventer, à bâtir.

Mais qui connaît Martin Nadaud ? Pas moi jusqu'à aujourd'hui et sans doute pas vous... Et pourtant, l'homme a quelque chose d'illustre et une solide réputation de visionnaire.

C'est lui qui, par exemple, à la suite d'un voyage à Londres a proposé de construire un métro à Paris, un port à Gennevilliers et envisagé avec le plus grand sérieux l'idée de creuser un tunnel sous la Manche. Il faut dire qu'en matière de construction, il en connaissait un rayon.

Ce fils de modestes paysans-maçons a quitté son Limousin, comme tant d'autres gamins à l'âge de 14 ans pour aller participer à l'édification de villes comme Paris et Lyon. A cet égard, il est le symbole des fameux maçons de la Creuse. Un corps d'élite. Le mot n'est pas trop fort. Et c'est parce que son père avait insisté pour qu'il sache lire et compter qu'il est allé jusqu'à la questure. On ne dira jamais assez l'importance du savoir.

La vie de cet homme à qui l'on doit le célèbre aphorisme «A Paris quand le bâtiment va, tout va...» est le sujet d'une exposition «Martin Nadaud, maçon et député» qui dure jusqu'au 7 mai 2010 à la Maison du Limousin à Paris. Elle a été réalisée par la très active association «Les Amis de Martin Nadaud» qui est aussi à l'origine de l'ouverture du domaine de la Martinèche, la maison musée de Martin Nadaud qui ouvrira ses portes en juillet 2010. Elle est naturellement rénovée de manière exemplaire et devrait constituer une des attractions majeures de ce département que l'on a souvent considéré comme déshérité et qui pourtant ne manque pas d'atouts.

Je reviendrai sur les célèbres maçons et leur fantastique savoir-faire, mais il faut aussi parler de richesses comme les fameuses tapisseries d'Aubusson inscrites au patrimoine mondial immatériel de l'Unesco et depuis peu de l'art français du tracé de charpente, inscrit au même titre que la tapisserie d'Aubusson à l'Unesco. On l'enseigne au fameux Lycée des Métiers du Bâtiment de la petite ville de Felletin à plus de 800 jeunes qui y apprennent le gros oeuvre, le génie civil, la taille de pierre, le bois et la fameuse charpente traditionnelle. Et de tous ces talents, je vous parle avec émotion. Mon papa a été l'élève de cette prestigieuse école où il a appris le métier de charpentier. Lui aussi a quitté Felletin à 16 ans pour aller reconstruire la France après la guerre et le talent de ces jeunes gens était si reconnu que lui même s'est retrouvé conducteur de travaux à 20 ans.

A sa suite, dans notre enfance, nous avons connu le charme des vacances au bord du lac de Vassivière, admiré (en traînant les pieds, imaginez, des gamines de 10 ans !), les bâtisses limousines en bordure de Creuse à Moutier d'Ahun, découvert le Monument aux Morts de Gentioux qui n'a jamais été inauguré et observé le silence devant Notre Dame du Bâtiment, représentation emblématique du travail des maçons.

La Creuse, c'est aussi - des people comme Nathalie Baye, savent en apprécier les charmes - le fameux Plateau de Millevaches qui nous terrorisait quand on ne rencontrait pas âme qui vive à la nuit tombée sur les routes bordées de fougères géantes. Evidemment elle développe ce tourisme naturel et courageux. Comme partout ailleurs, on peut trouver tous les hébergements possibles et imaginables. Roulotte, chambres d'hôtes au château et surtout Le Tai Rial de René et Brigitte, juste en face de la maison de Martin Nadaud. Visiter aussi l'étonnant village de Masgot, pays des maçons tailleurs de pierre où le granit est roi. On peut même participer à des ateliers de taille de pierre. L'occasion peut-être, pour les enfants, de découvrir un métier gratifiant et de se dénicher une vocation. Qui vaudrait sans doute tous les postes de gratte-papier du monde !

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